FIV

La FIV, ou fécondation in vitro, est un protocole de procréation médicalement assistée.C’est aussi le titre du travail photographique que j’ai réalisé à partir de ma propre expérience, celle de ce corps, vivant, subissant ce processus.Mêlant différentes esthétiques selon les phases du procédé et les états intérieurs traversés, cette série voudrait entrouvrir la porte de mon univers, ou du moins, de celui dans lequel j’ai évolué pendant ces presque trois années.
Au départ j’ai commencé cette série pour moi, pour mettre de la distance, pour amoindrir la douleur, pour la rendre moins réelle.
La fécondation in vitro débute par une stimulation ovarienne par injection d’hormones, afin qu’un maximum de follicules deviennent matures. Ensuite l’ovulation est déclenchée, également par une injection. Il y a recueil de spermatozoïdes et ponction d’ovocytes par voix vaginale, puis, dans notre cas, fécondation par ICSI (les spermatozoïdes sont micro-injectés dans l’ovocyte). Enfin, ce dernier est mis en culture et, si embryon il y a, il est transféré dans l’utérus. Les autres, si plus d’un a passé le cap de la fécondation, peuvent être congelés pour être implantés plus tard. Durant toutes ces étapes, les taux d’hormones sont surveillés par prises de sang et, l’utérus, par échographies endovaginales.
Entre le diagnostic d’une endométriose, la décision de recourir à une assistance médicale et la fin – l’échec – de notre seule et unique FIV, se sont écoulés presque trois ans. Une longue période de doutes, d’attentes, d’actes médicaux, de douleurs physiques et psychologiques, d’espoir et de déceptions, rythmés par les cycles menstruels. C’est long, c’est difficile. On est dépossédée d’une partie de soi, on ne décide plus de rien. Plus on avance, et le cas échéant, plus il y a d’échecs, plus avoir un enfant et ces démarches pour l’avoir deviennent une obsession.
J’ai beaucoup lu de témoignages pendant cette période, mais souvent, les personnes parlaient de leur expérience au jour le jour, de leurs sentiments ou fournissaient des explications médicales assez abstraites ; et moi j’avais besoin d’images pour me rendre compte.
La prise de vue s’est alors imposée comme une bouée. La photographie m’a permis de devenir actrice, de reprendre la maîtrise d’une situation que les soignants seuls sont censés dominer. Tantôt face à eux, au moyen format, lors des rendez-vous médicaux, tantôt dans mon studio, confrontée à ces nouveaux objets de soin à apprivoiser, tantôt au téléphone en laissant surgir instinctivement des images dans mon quotidien. En rassemblant ces photographies, j’adresse ce travail à celle que j’étais au début du parcours, mais je souhaite aussi tenter d’apporter un éclairage sur cette expérience pour des personnes qui s’apprêtent à la traverser ou qui voudraient mieux la connaître.
J’ai voulu montrer les actes et leurs conséquences concrètes, pour souligner la différence entre cet acronyme, FIV, qui fait référence à un geste de laboratoire, et ce que ce processus engendre finalement pour celles et ceux qui s’y lancent.
J’ai fait un reportage sur moi-même par moi-même, pour montrer les lieux, les instruments, les corps et suggérer l’attente, les sensations, les sentiments. Je voulais que la photographe témoigne du chemin. Montrer à quel point on y est enfermée, on se replie, on devient hermétique au monde extérieur, on erre comme dans une boite transparente. Ce « combat » pour avoir un enfant devient un combat contre soi-même, une lutte contre ou pour un fantôme.
Cette FIV fut un échec, et nous avons décidé, avec mon mari, d'arrêter là la PMA. Mais la vie nous a fait une surprise...













